Station Néolithique à Djidjelli (Algérie) – Par Ch. FERTON

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Site Néolithique de Oued El-Kantara – Jijel

 Station Néolithique, Algerie, Djidjelli, porphyre La ville de Djidjelli est bâtie au bord de la mer, sur une alluvion horizontale élevée de quelques mètres seulement au-dessus des eaux ; cette plaine s’étend à l’est en longeant le bord de l’eau, où elle a été entamée par la mer, qui a incurvé son rivage vers le sud.

La terre de l’alluvion est composée en grande partie d’argile ; elle se délite très peu au contact de l’air et forme le long du rivage une petite falaise verticale de 3 à 4 mètres de hauteur, courant à. une quarantaine de mètres de l’eau. Le sol argileux de la falaise est compact et dur et set laisse difficilement entamer par une pointe de fer ; il ne contient généralement pas de pierres ; on y voit rarement de gros galets isolés, qui pourraient avoir été apportés par l’homme; il n’a jamais été remanié.

Pendant l’été 1913, j’ai trouvé, dans cet escarpement vertical, des outils préhistoriques, que je rapporte à la période néolithique. Le gisement que j’ai reconnu s’étend sur un demi-kilomètre environ, depuis une crête rocheuse coupant la falaise, à trois ou quatre cents mètres à l’est de l’établissement de bains, jusque près d’un petit étang, où aboutit l’Oued el Kantara. 

Vers le sud le même alluvion renferme des roches taillées semblables, ainsi qu’on peut s’en assurer en explorant les chemins où le sol a été creusé, parfois assez profondément, par le passage des voitures. De la falaise j’ai extrait des outils et des éclats in situ qui étaient engagés dans le limon, d’où ils n’émergeaient souvent que de quelques millimètres. Ils étaient rares; bien que le gisement paraisse riche, parce que les agents atmosphériques attaquent très lentement la terre de l’escarpement.

Ils étaient généralement horizontaux, groupés par trois ou quatre dans un espace Moindre que un mètre, et à la même hauteur, mais tout aussi fréquemment à des hauteurs un peu différentes et inclinés sur l’horizontale. ll était visible que leur dépôt s’est effectué sur un sol peu consistant ou qui a été ramolli ultérieurement par les inon-dations, qui ont. apporté les couches supérieures de l’alluvion.

 

 Station Néolithique, Algerie, Djidjelli, porphyre, oued El-Kantara

 

Ces objets étaient à des hauteurs diverses, variant du milieu de escarpement jusqu’à sa partie supérieure, le plus généralement vers les deux tiers de sa hauteur comptés à. partir de la baie; et le gisement se continuait dans la mince couche de terre végétale, et sûr le. sol, où les outils préhistoriques étaient assez abondants, mais souvent. différents des précédents. D’autres roches taillées étaient au pied de là falaise, ou collées à sa surface, pouvant-provenir de la surface du sol ou de la couche voisine; il n’en sera point d’abord question.

Roches employées. – Le substratum de l’alluvion est composé de tufs, de grès et de sables. A une distance d’une dizaine de kilomètres au moins de la ville, la nature du sol change; et on voit émerger un porphyre, souvent très dur et à grain fin, apte à servir de matière première aux tailleurs de cailloux des temps néolithiques. Les carrières de Cavallo, situées à 20 kilomètres de Djidjelli, sont exploitées activement et fournissent des matériaux pour la construction des édifices et des ouvrages d’art, et pour l’empierrement des routes.

 Ce sont ces porphyres que recherchait le Néolithique de Djidjelli, il le trouvait en abondance parmi les galets roulés par la mer, ou parmi ceux apportés par l’Oued el Kantara dans ses fortes crues. C’était la matière la plus fréquemment employée ; mais le grès était également utilisé, recueilli parmi les galets qui fournissent les plus durs échantillons. Une roche siliceuse, dure et à grain fin, était aussi recherchée, surtout vers la fin de la période néolithique, pour la confection des outils à pointe fine ou des grattoirs à retouches soignées ; mais je ne l’ai trouvée in situ que dans les couches les plus élevées de la falaise. Dans les parties plus basses, je n’ai vu que du porphyre, du grès et une seule fois du calcaire.

Industrie observée dans l’escarpement. – En s’en tenant aux pièces recueillies, comme it a etc dit plus haut, dans la falaise, on est en présence, me semble-t-il, d’une industrieusement néolithique. Toutes les pièces sont de grandes dimensions, taillées à grands éclats; ce sont des pointes de lance et de javelot; des pointes-outils, des lames et des racloirs (Fig. 1 et 2).

Les pointes de lance et de javelot sont les objets qui caractérisent le gisement ; j’en possède une seule entière de chaque sorte. Toutes deux sont de même facture : lisses sur la face d’éclatement, l’autre face retaillée sur une partie des bords, le talon constitue par le plan de frappe, non retouché; mais les deux bords voisins incurvés et finement retaillés et arrondis en dessus.

Ces deux pièces sont en porphyre. La pointe de lance (Fig. 1 ; N° 13) a  0m113 de longueur, non compris une très petite partie de son extrémité qui est brisée; sa pus grande largeur est 4m05 et son épaisseur, assez réguliere, est environ 0m008. Elle était engagée dans escarpement vers le milieu de sa hauteur, à un endroit où il est formé par un conglomérat de modules noirs, empâtés dans l’alluvion et paraissant provenir de la désagrégation de couches schisteuses sous-jacentes. La pièce était horizontale et s’enfonçait perpendiculairement dans la falaise, d’où elle ne faisait saillie de 0m03 à 0m04. Elle était donc bien in situ.

 

 Station Néolithique, Algerie, Djidjelli, porphyre, oued El-Kantara

 

La longueur de la pointe de javelot (Fig.1; N° 14), est de 0m07; sa plus grande largeur 0m025, son épaisseur, moins régulière que celle de la pointe de lance, est en moyenne de 0m005. Elle se trouvait à la même hauteur que la première, à 2 ou 3 mètres d’elle, également horizontale ; mais elle n’était plus enfoncée dans le talus que de 0m02 ou 0m03.

J’ai longuement insiste sur ces deux objets, déjà connus d’Algérie, parce que, caractérisant l’Age du gisement, ils précisent aussi celui du terrain qui renferme le dépôt : ce qui est intéressant pour l’histoire géologique de la région.

La plaine d’alluvions, sur laquelle est bâtie n’est pas quaternaire, tout au moins dans sa moitie supérieure ; elle est contemporaine de l’homme néolithique. J’ai vainement cherché des fossiles dans ce terrain; je n’y ai trouvé que deux coquilles, peut-être très récentes ; ce sont, m’en a écrit le commandant Caziot, des Oleacina (Glandina), qui, jeunes, ont tous les caractères de l’Oalgira Brug, qui habite actuellement l’Algérie.

Une autre pièce offre quelque intérêt; c’est un grattoir, partie de galet fendu en long et retouché sur un seul cote ,sur toute la longueur d’une arête (Fig. 1; N° 9). Sa face d’éclatement est intacte ; il est en calcaire et sa longueur est de 0m068.

Les autres objets, figures clans les deux tableaux et recueillis dans la falaise, sont ceux indiques par les numéros :

1 (lame-pointe en grès); .4 (grattoir en grès); 29 (pointe en grès); 30 (lame en grès) ; 31 et 34 (lames-pointes : la première en grès ; la seconde en porphyre).

Le large couteau n° 15, en porphyre, était engagé dans le talus, a 4 ou 5 mètres de la pointe de lance, dont il a été parle plus haut et la même hauteur qu’elle ; il a été tiré de la même roche que la petite pointe de javelot. La grande lame no 32 doit être rangée dans cette série d’objets ; je l’ai trouvée enfoncée dans l’alluvion, dans le talus d’un chemin voisin de la falaise.

Je n’ai vu aucune pièce en silex vers le milieu de l’escarpement ; mais j’en ai recueilli quelques-unes près de son sommet. Le couteau-percoir en silex n° 12 était à 0m10 au-dessous de la couche de terre végétale; celui n° 17 a 0h trouve a quelques mètres des deux pointer de lance et de javelot, dans le conglomérat où elles avaient été déposées. II est représenté avec le nodule auquel il était fixe, preuve qu’il a pris place dans le dépôt au moment de sa formation.

Industrie observée a la surface du sol et dans les couches voisines. — Sur le sol, autour de Djidjelli, les outils préhistoriques abondent : les uns identiques à ceux dont il a été parlé tout a l’heure; d’autres de facture différente et indiquant peut-être une époque plus récente.

Les endroits qui m’ont paru les plus riches sont : le plateau terminant à l’ouest l’anse des Beni-Caïd, les environs immédiats du fort Galbois et la plaine voisine de l’escarpement néolithique.

Quelques pièces ont été finement retaillées : celles n° 22 (pointe et grattoir) et n° 24 (pointe et grattoir à encoche), toutes deux en silex, et provenant du voisinage du fort Galbois. Le n° 16 est une extrémité de pointe de lance en roche siliceuse, trouvée sur le sol, près et au-des-sus de la falaise ; il porte des retouches faites avec soin.

Le n° 3, en grès, recueilli à la surface du sol près du fort Galbois, est taillé sur ses deux faces en forme d’outil chelléen, et pourrait évoquer l’idée du Quaternaire s’il n’était isolé ; il est de petite taille : 4-5 cm. de longueur. Un autre objet qui peut être signalé est celui n° 35; c’est une extrémité de hache polie faite avec un galet roulé de porphyre. La face supérieure était celle du galet, et l’ouvrier n’a eu à polir que la face inférieure et celle latérale droite (1).

(1) La provenance non encore indiquée des objets représentés daiis les deux Figures (1 et 2) est la suivante : Falaise (pièces non in situ) ou ses environs, n » 16, 18, 19, 20, 21 (roche siliceuse), 26 (grès), 33 (porphyre).— Port Galbois, 2 (porphyre ?), 5, 6, 22, 23, 24 (silex). — Anse des. Beni-Caïd, 7, 8, 10, 11, 25, 27 (porphyre), 28 (silex).

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Source : Bulletin de la société préhistorique française,  Tome XI, P. 241.

 

 

 

 

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